Millésime octobre 2013... Camargue n°5
"Récit de Lilian Fautrelle"
Le voilà ce moment redouté. Celui auquel j'évite de penser depuis 4 jours. Celui que l'on ne mentionne jamais durant ces séjours... le départ... ce moment où je dois reconnecter avec l'exigence de ma vie professionnelle et ses impératifs, m'imposant ici d’emprunter la voie ferroviaire pour Paris. Prenant pied sur cet embarcadère rhodanien (au sens provençal du terme) jouxtant insolemment mon quai de départ. Je remercie d'un dernier signe les amis pour ces nouveaux jours de gala que nous venons de passer tous les trois... encore une fois. Et puis après tout, je ne suis pas non plus contraint de me replonger à la seconde dans le tumulte de ma vie professionnelle parisienne... pendant les quatre heures de ce voyage qui me remonte sur la capitale, j'ai tout loisir de laisser mon esprit vagabonder et revisiter cette session qui s'achève pour moi sur une nouvelle casse de canne et la promesse d'une rencontre supplémentaire avec un géant du Rhône qui me fil entre les doigts...
...4 jours plus tôt, sur le Rhône...
L'entrée en matière fut des plus rapides, idéale pour la confiance et le déroulement d'une telle session...
Quelques minutes de pêche, un blank qui se courbe et un frein qui se met à hurler pendant de longues, de très longues secondes...
Manu nous rappelle si besoin en est ce pourquoi nous voyageons sur ce fleuve... avant même que j'ai pu expliquer à David comment activer le mode autofocus de l'appareil photo, le premier gros poisson de notre sessions est en train de ferrailler sévèrement. Les rushs sont longs et puissants, nous contraignant à suivre ce poisson belliqueux au moteur pour ne pas rendre de l'angle exagérément... et malgré toutes les difficultés que nous rencontrons pour saisir à la main ce premier silure aussi combatif que mal piqué (souvenez vous, chat échaudé craint l'eau froide, et je n'ai pas plus envie que ça de finir de suite avec un triple dans la main...), un splendide spécimen du Rhône vient d'entrée poser avec nous.
La température est prise et le tempo est donné, plus puissant qu'un Mercury 50 CV, nous avons un Manuchon de gala du début à la fin du séjour, plus déterminé que jamais à franchir la barre des 230 cm qui le fuit si rageusement depuis quelques temps!
la météo est avec nous, ce qui convenons en, renforce la concentration et la détermination, d'autant que nous touchons chacun notre tour quelques poissons agréables
Malgré quelques désagréables impromptus, comme la casse d'une première canne pour moi sur un gros poisson, d'un bas ligne pour Manu ou d'un corps de ligne pour David, les poissons de plus de 2 mètres défileront régulièrement dans le bateau pendant ces jours de pêche, avec de nombreux enchainements magiques, comme ces deux larges poissons capturés par Manu en moins de 2 heures.
Bien sur, inhérent à ces sessions, l’évènement redouté, c'est la défaillance matériel... la panne, la casse, la perte d'un élément irrémédiable, capable de mettre à mal voir d'enterrer la session de pêche la plus désirée...
Nous n'échapperons pas à ce phénomène avec la panne de notre moteur électrique dès le deuxième jours de pêche...
Stupeur, incompréhension, rage, puis arrive l'acceptation, la réflexion et les décisions... A la vue des météos annoncées, nous restons et continuons notre session, exploitant aux mieux les veines d'eau, renforçant les placements de l'embarcation au moteur thermique, et corrigeant tant bien que mal les dérives à la main...
Assez rapidement, nous nous rendrons compte que.... ça pêche!
d'autres bien plus trappus, comme celui ci qui nous vomira patate à l'eau, poulet, ossements, et un peu de riz en mode blanquette... et un petit montage fireball en dessert... un fin gourmet
Le tout au milieu des fous rires et des boutades incessantes (il faut dire que quand David a attaqué avec son moulin spoolé en tresse 25/100ème, j'ai bien rigolé, encore plus quand ça a fait "Pendu! Shlack!" en moins de deux secondes!... mais bon, je n'avais pas prévu que ma canne Jig ferait la même chose quelques heures plus tard... le retour de flammes fut terrible lol))
Au fur et à mesure de la session, les poissons deviennent de moins en moins visibles à l'échosondeur, mais ils répondent toujours plutôt bien à nos montages et animations. Les combats du Rhône en verticale sont toujours épiques d'autant que le soleil nous accompagne quotidiennement......
Si nous touchons tous de nombreux poissons, je vous laisse juge de l'opposition de style entre les sous vêtements de mes deux équipiers! :-D
Et parmis nos prises, David nous gratifie d'un magnifique poisson géant, à quelques dizaines de millimètres seulement de son record personnel!
Et au détour d'un doublé sympathique, nous prenons le temps d'apprécier une bonne séance photos souvenirs...
L'histoire magnifique de chacun des jours se répète le lendemain, avec toujours de la rigolade, des poissons, des secteurs somptueux, des poissons mythiques, et l'on se prend bien sur tous en ces lieux à rêver d'encore plus... il ne faut pas se le cacher, le poisson albinos, le poisson record, nous le mentionnons toujours avec humour, mais quelque part, nous le recherchons activement...
Comme dans les profondeurs, avec cette ancienne voie ferrée détruite pendant la seconde guerre mondiale
Nous croiserons des copains Saône et Loiriens, également en train de se faire chahuter par un big fish!
Et puis nous continuons encore et toujours notre petit rythme immuable, soleil, touche, ferrage, combat, poisson, déconnade, (quelques décroches aussi il faut bien l'avouer), petits écoliers et carambars au nougat en guise de collation...
Pendant quatre jours, c'est donc l'euphorie permanente, du levé 5h00 au couché 23h00. Nous ne parlons, pratiquons, nous enivrons qu'uniquement de pêche et de silure (bon une petite bouteille de Chambole par ci, une autre de Gewurzt par là... force est de le reconnaitre quand même :-) ).
Toutes les bonnes choses ayant une fin, conscient d'avoir encore passé une session de privilégiés, arrive la dernière. La dernière navigation de ce millésime 2013 pour moi, le sac à dos posé devant les genoux, tenue de travail et dossiers soigneusement protégés, il est temps de remonter vers la civilisation....
Quelques minutes auparavant, une grosse tache rouge sur le fond visible à l'écho sondeur, une touche violente, un ferrage, quelques secondes de combat puis... une nouvelle casse de canne. Quelle stupeur, moi à qui cela n'était jamais arrivé, deux en quatre jours... l'apprentissage est un processus long, permanent, fait d'essais, d'expériences et d'erreurs. En voici une étape amère mais qui me sera bénéfique au final j'en suis certain.
Si les postes de ces derniers temps voyaient leur rentabilité diminuer légèrement surtout en terme de taille de poissons, ce fait vient valider les prochains secteurs à prospecter pour la fin de la session!
David me montre que même en ayant eu le temps de raccorder le corps de ligne à une autre canne, l'issue eut été plus qu'incertaine. En effet, de nombreux points de fragilité sont visibles sur la tresse qui a frottée contre les fibres brisées.
Une toilette rapide dans le Rhône, un chagement de tenue, et me voilà prêt à retourner affronter mon quotidient professionnel.
Que s'est il passé ensuite?
Le L6-Boat a repris la pêche avec Manu et David à son bord...
Direction le poste de la casse précédente. La liaison sms permanente Paris-Rhône me permet d'assister à distance à la fin de cette session de fou.... une fin de folie, et un Manu de gala pour des derniers poissons mémorables!
Si le rythme des silures toutes tailles confondues reste soutenu, Manu penche en contre pied de beaucoup de patterns explorés jusqu'alors pour de "l'ultra léger", à la mode silure bien sur! Fireball au grammage très réduit et appâts naturels de petites tailles se retrouvent dandinés sur le fond....
Et une petite visite de la gendarmerie et leur embarcation très impressionante. Entre nos sessions à St Jean de Losne ou à Lyon, siège de deux brigades fluviales, l'équipement et l'ensemble des papiers du bateau est totalement en règle.
Il reste quatre heures de pêche pour le binôme encore sur l'eau, quand Manu prend une première tombée de foudre dans le blank de sa SGT 206! Au ferrage réflexe s'engage un combat caractéristique. Passé les coups de têtes rageurs du poisson qui vient de se faire piéger, celui ci plaque le fond et enchaine les rushs. La confirmation à l'écho est bonne, c'est biiiiiiig! Après un long combat, une magnifique récompense.
Dopé par cette décharge d'adrénaline, et toujours à la quête de cette barre des 230 et +, Le bateau reprend la pêche quelques minutes... quelques minutes seulement car le micro montage de Manu vient déjà de se faire toquer par un nouveau grand silure!
Le poste bien compromis par ces deux lourds combats successifs, la dernière heure de pêche se fera sur un nouveau secteur... et offrira à Manu un dernier combat!
Le plus long (45 minutes minimum), le plus lourd, le plus incroyable de ce séjour, à quelques minutes à peine du clap de fin de session....
De mon côté, je reçois le timer en sms... "15 min de combats, ca a l'air lourd" / "30 minutes de combat, tjrs plaqué au fond, on a fait 150 mètres!" "45 minutes, ça dégaze tout doux, les bulles sont énormes"...
A plusieurs centaines de kilomètres de là, j'arrive à prendre la pression! j'espère que ce poisson finira dans le bateau.
Puis la libération: "Fish dans le boat, une V A C H E"!
Un poisson typique du Rhône, surgras, extrêmement puissant, disposant de plus de 10 mètres de profondeur d'eau pour se défendre. Le plaisir à l'état pur pour nous traqueurs de silures passionnés.
Cerise sur le gâteau, la barre des 230+ est franchie pour Manu qui signe là son nouveau record personnel, où comment incruster dans nos mémoires une session qui se présentait déjà comme inoubliable! (au passage, 3 gros steacks en trois heures.... CHAPEAU bas!)
Manu et David boucle la boucle de ce 5ème opus... Manu qui a débuté par un géant, conclu par un géant, et David qui à attaqué sans l'autofocus, conclu sans l'autofocus lol (la petite vanne David, c'est pour toi, c'est cadeau ma poule ;-), inutile de poster en bas du reportage "fautrelle va te racheter des cannes", je suis en train de chercher ce qui pourrait faire mon bonheur).
Que du bonheur, une fois de plus... et de nombreux souvenirs et anecdotes à se remémorer avec bonheur, en attendant la prochaine ;-)